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Vendredi 26 avril.
Oh! cette fête de l'avant dernière nuit et surtout cet éther dans le champagne frappé de cette salade de fruits! Je l'ai encore dans le sang, cet éther, car voilà deux jours que je grelotte sans pouvoir me réchauffer, et avec cela une sensation d'étouffement et d'oppresion telle qu'il me faut toute mon énergie pour ne pas en reboire, de l'éther. L'éther, le poison qui délivre, le poison immatériel par excellence qui vous souffle dans les poumons le froid vivifiant de la neige et de l'air lacé de la montagne !... Des soupes Jacques à l'éther, n'est-ce pas une invention tout à fait diabolique, une imagination de folle ou d'éthéromane ?
Jean Lorrain (Poussières de Paris)
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CD "Fleurs de névroses et d’éther", le nouvel album studio dans la lignée d’En attendant l’apocalypse,
« Le
sixième album longue durée de Paris Violence, après 16 ans d’existence
et une discographie foisonnante, s' inscrit dans la lignée directe du
désormais mythique En Attendant l’Apocalypse
: atmosphères décadentes et fin-de-siècle, parfum de paradis
artificiels et dandysme sans concession. Grosse production studio étalée
sur plus d’un an, sans conteste le plus travaillé des disques du groupe
mais aussi le plus puissant. Entre streetpunk et heavy metal, agrémenté
de claviers épiques et atmosphériques, il scelle la rencontre entre The
Exploited et Iron Maiden, sur fond de textes d’une grande qualité
littéraire. Couverture d’Alexis Bert. »
L'ÉTHÉROMANE
Elle était pâle, pâle en sa frêle beauté, Pâle avec une bouche effroyablement rouge. J'avais fait sa rencontre un soir au fond d'un bouge, Séduit par sa faiblesse et son étrangeté.
Elle avait de longs yeux emplis de clartés vagues, Yeux glauques où passaient d'indicibles émois, Puis elle avait des mains si blanches que les doigts Semblaient des lis de neige éclos au coeur des bagues.
Quand elle vous frôlait comme une ombre, en glissant, Un si troublant parfum de secrète luxure Émanait de sa chair exquisement impure, Qu'un frisson d'inconnu vous courait dans le sang...
Chercheuse de bizarre, amante du mystère, Elle avait un dégoût profond pour le banal. Son livre de chevet était les Fleurs du Mal Et tout son corps tremblait en lisant Baudelaire.
Oh ! qu'elle m'affolait quand, en son clair peignoir, Elle me souriait d'un sourire sinistre Et que ses grands yeux verts, ses yeux cerclés de bistre, M'attiraient, lentement, tout au fond du boudoir !
Je l'aimais d'un amour malade et nostalgique, Fait de dilettantisme et de perversité, Par elle j'ai su tout ce que la volupté Fait germer au cerveau d'une femme hystérique.
Et c'était chaque nuit un fol enchantement Quand, parmi le frisson mêlé des chevelures, Elle me prodiguait ses morbides luxures Et vidait son flacon d'éther en se pâmant...
Edouard Révérand
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In MINUIT HEURE DU CRIME, par Edouard Révérand. Société française d'imprimerie et de librairie, PARIS, 1913
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