-   Quatre  autres poèmes  -





 

 




 


 

                                                                    

                        "PAVOTS BLEUS", "Partie en fumée", "La forêt", "Être à deux"      


 


 Pavot bleu
 

Pavot bleu de tes yeux
Où l’or s’endort.


Quand la nuit s’enfuit
Donne-moi ton émoi
De cœur à corps


Sans l’esprit que je prie.







 
Partie en fumée
 

Son souffle a pris ma vie à l’audace d’un soir
Depuis lors je m’absente du cours des jours blêmes.
Et en vain je le suis sur le long chemin noir
Car aveugle il se tient devant l’or que je sème.


Je respire l’ivoire aussi froid que son cœur.
Lui me parle bien mieux que ses lèvres serrées.
Il me dit sans un bruit le langage des fleurs
Et l’incommunicable sens des vers dorés.


Mais lorsque ma bouche se fiance à la pipe
Ma chair orpheline se souvient de son nom :
Un homme, à l’assurance triste qui s’
agrippe
Et tarit le bonheur jaillissant de mon don.

Les aiguilles agitées, pacifiques, me tentent
Et d’un trait j’aimerais me percer l’âme avec.
Oublier, oublier cette détresse lente,
Acharnant mieux la vie que les vers l’arbre sec.


L’espoir clair de la lampe attire mon regard.
Papillon ivre de mort, j’y perçois mon geste :
L’amour brillant dont ses yeux jamais ne se parent,
L’amour d’une femme qui s’immole sans reste.







 

La forêt

 

Belle reine barbare à la parure verte
On va jusqu’en ton sein par des chemins perdus.
Tes entrailles blêmissent au soupir fondu
D’une étrange pensée que la brume a couverte.


Mais au cœur averti il n’est point de mystère.
Les confuses paroles et symboles lui disent
Ce que l’esprit du haut de son trône méprise :
« Je suis commencement, vie et fin, où tu erres. »


On se croit seul dans un royaume végétal.
Or, sont là tous les êtres à observer l’impie.
Milles vies nous entourent, mille yeux nous épient
Près des fûts érigés scandant l’air vespéral.


Et parfois le soleil tend ses doigts de lumière
A travers la chevelure lourde et bruissante.
Il allume des feux d’émeraude changeante
De saphirs et rubis en tapis de prière.


On se plaît à s’étendre et goûter aux fruits mûrs,

Douces lèvres vermeilles au délicat parfum
Qui nous comblent de joie et apaisent la faim.
Puis on s’endort, amoureux des hautes ramures.

Mais la dame a fardé sa sauvage beauté
Et revêtu ses reins d’une armure d’épines,
Par de brûlants drapés repoussé les rapines.
Sous tes dehors exquis tu tais la vérité.


Tes obscurs secrets grouillent de saintes horreurs.
Tu fais jaillir la vie d’infectes pestilences.
Champignons, vers et larves en bonne complaisance,
Discrets mangeurs de mort s’acharnent au labeur.


Tes colonnes nourries d’un poison salutaire
Jettent dans leur verdure trépas et oubli.
Crache ton ventre des pourritures anoblies
Que des siècles de songe ont martelées en terre.


Qu’est la mort en regard de toutes ces luxures ?
Tu la tiens sous ton joug et la rend misérable.
Elle est froide ou brûlante, de glace ou de sable
Et fuit devant l’odeur des putrides verdures.


Mer de fertilité, tu élagues le temps
Et l’existence puise à ton œuvre sa voie
Les anciens contes prient sur l’autel de tes bois
Et nous font percevoir la sagesse du vent.





 


 
         




Être, à deux

Tu es le soir et je suis le songe
Tu es le désir et je suis le sentiment
Tu es la caresse et je suis l'instant
Tu es le regard et je suis le jade
Tu es le trésor et je suis le secret
Tu es l'étoile et je suis l'infini
Tu es la couleur et je suis la main
Tu es la musique et je suis le goût
Tu es le nom et je suis l'inspiration
Tu es le poème et je suis le temps

Tu es la lumière et je suis la cigale
Tu es l'aiguille et je suis le mouvement
Tu es le parfum et je suis la fumée
Tu es ma drogue et je suis ton remords
Tu es le miroir et j'aimerais être ton âme 

Tu es l'absence et je suis le souvenir
Tu es le silence et je suis la souffrance
Tu es l'indifférence et je suis le cynisme
Tu es l'inattendu qui appelle ma mort
Quand tu es l'intérêt, tu n'es plus le mien
Tu es mon plus grand regret lorsque je suis ton jouet
Tu es ma plénitude et je ne suis plus rien
Mais ton cœur n'est pas mien et l'amour nous sépare.
Si tu voulais...


 

Doriane de Retz 



  





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